“IL FAUT DES HOMMES DERRIERE LES ORDINATEURS”

En avril dernier, le centre pour la recherche et l’innovation dans l’enseignement de l’ocde vous a remis, ainsi qu’à vos homologues étrangers, six scénarios pour l’école de demain. deux d’entre eux insistent sur le fait que le d&#23

En avril dernier, le centre pour la recherche et l’innovation dans l’enseignement de l’ocde vous a remis, ainsi qu’à vos homologues étrangers, six scénarios pour l’école de demain. deux d’entre eux insistent sur le fait que le développement des technologies de l’information et de la communication (tic) favorise un "démantèlement" des systèmes scolaires actuels et estiment que, dans quinze à vingt ans, les écoles publiques ne subsisteront que "pour les exclus du numérique" et courront le risque de se transformer en "dépotoirs". Jugées "plausibles" par les experts de l’ocde, ces évolutions ne vous paraissent-elles pas plutôt tenir du scénario catastrophe ?

Le démantèlement du système scolaire que vous évoquez ne me semble pas plausible. Certes, les technologies de l’information et de la communication modifient la façon d’enseigner et permettent de donner accès à des ressources éducatives en dehors de l’école traditionnelle. Mais si le rôle du maître évolue, sa présence reste indispensable pour guider et orienter l’élève. C’est à lui de développer l’esprit critique des jeunes. Un ordinateur seul n’enseigne pas. En outre, l’école publique gardera une mission incontournable de socialisation et de rencontre qui implique une présence physique dans l’école et qui va bien au-delà du simple enseignement des disciplines. Nos concitoyens et tous les parents d’élèves y sont particulièrement attachés.Enfin, le scénario catastrophe que vous évoquez fait abstraction de tous les efforts que nous avons engagés pour moderniser notre système éducatif et pour faire entrer le multimédia et Internet à l’école. C’est en fait l’inverse qui se produit : l’école devient le lieu privilégié où l’on se familiarise avec l’informatique et où l’on peut avoir accès, sous la conduite d’un enseignant, à toute la diversité d’Internet.

Depuis quatre ans et le "discours d’Hourtin", le ministère de l’éducation nationale a engagé un vaste chantier et consenti de lourds investissements en matière de technologies de l’information et de la communication : du raccordement des établissements à Internet à la construction d’un espace numérique d’éducation. Est-ce à dire que nous sommes face à une révolution en matière d’éducation ?

C’est en tout cas une évolution indéniable. A Hourtin, Lionel Jospin a fixé ses priorités pour faire rentrer la France dans la société de l’information : au premier rang de celles-ci, l’introduction des technologies de l’information et de la commu nication dans l’enseignement. Depuis, un plan ambitieux s’est mis en place et des efforts financiers et humains considérables ont été engagés. Cela reste une nécessité pour l’école, même compte tenu des difficultés de la nouvelle économie. Il faut former les générations futures à l’utilisation raisonnée de l’informatique, donner à tous les élèves, partout en France, les mêmes conditions d’accès aux ressources multimédias, moderniser l’enseignement et enrichir la pédagogie.Depuis le discours du premier ministre à Hourtin, notre action a eu des résultats concrets pour l’équipement informatique, la connexion à Internet des établissements et la formation des enseignants. Nos priorités ont maintenant été ajustées pour développer l’usage et mettre de nouvelles ressources multimédias à disposition des élèves et des professeurs.

On reproche au système éducatif français d’être trop rigide, à l’école d’être trop cloisonnée (votre prédécesseur parlait de "sanctuaire") et à l’éducation de masse de ne pas savoir s’adapter aux besoins individuels… Pensez-vous que les TIC en général et Internet en particulier – qui faciliteraient un apprentissage plus autonome et tout au long de la vie – soient une solution à ces maux de l’enseignement ?

Les technologies de l’information et de la communication permettent effectivement un apprentissage plus autonome, notamment grâce à certains outils comme les logiciels d’autoformation ou d’autoévaluation. Mais l’apport le plus précieux des TIC concerne la différenciation de la pédagogie suivant les élèves. Elles permettent en effet à l’enseignant de suivre chacun de ses élèves. Imaginons par exemple une scène de classe habituelle. Le professeur pose une question, un élève lève le doigt et répond. L’enseignant n’a pu tester que sur un seul élève si sa leçon a été bien comprise. Avec l’informatique, tous ses élèves pourront répondre sur leur ordinateur en réseau et le professeur saura qui a compris et qui a encore besoin d’explications. Ce n’est qu’un exemple et l’on peut en imaginer bien d’autres. Cela ne veut pas dire pour autant que les TIC sont une solution à tous les problèmes, mais elles permettent des progrès considérables au service d’une plus grande individualisation et d’une valorisation des compétences des maîtres, qui sont soulagés des tâches les plus répétitives.

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